Comme souvent, les journaux britanniques de la semaine dernière commentaient abondamment l’actualité du Conseil de l’Europe. Mardi, l’organisation a voté, à l’unanimité, contre l’interdiction de la burqa dans les pays européens. Il marquait ainsi sa distance avec les projets de loi français et espagnol visant à interdire le port de ce vêtement religieux dans l’espace public. Les représentants de 47 pays européens constituant l’assemblée parlementaire du Conseil, ont estimé que l’interdiction générale de la burqa s’opposait au droit des femmes ”désirant sincèrement et librement” se couvrir le visage. Le Conseil a également appelé le gouvernement suisse à revenir sur sa loi contre les minarets, jugée ”discriminatoire”.
Jeudi, la Cour européenne des droits de l’homme a indiqué qu’elle ne pouvait nullement garantir le droit au mariage des homosexuels. L’affaire, concernant un couple homosexuel autrichien, avait suscité un vif débat au Royaume-Uni. Le gouvernement britannique était même intervenu comme tiers parti, inquiet des éventuelles pressions dont il aurait pu faire l’objet, si le couple avait eu gain de cause, pour dépasser le régime de partenariat civil, actuellement en vigueur au Royaume-Uni, et permettre le mariage homosexuel.
Une institution mystérieuse
Le 25 juin, la presse commentait l’avis du Conseil de l’Europe contre les boîtiers Mosquito, qui émettent des ultrasons uniquement audibles par les enfants et les adolescents, déjà utilisés par 25% des municipalités anglaises. L’assemblée parlementaire du Conseil a unanimement appelé à l’interdiction de ces dispositifs, jugés ”particulièrement choquants”. Les nombreuses déclarations et décisions de cette organisation siégeant à Strasbourg peuvent avoir de profondes répercussions sur le paysage politique et juridique du Royaume-Uni. Et pourtant, en dépit de cette influence croissante, le Conseil de l’Europe reste une institution mystérieuse aux yeux de bon nombre de citoyens.
Le Conseil de l’Europe est la plus ancienne des organisations européennes modernes. Fondée en 1949 pour protéger les citoyens européens contre des exactions comme celles commises lors de la Seconde Guerre mondiale, elle rassemble les 47 pays du continent, à l’exception de la Biélorussie. Depuis 1986, toutefois, le Conseil de l’Europe souffre d’un problème d’image essentiellement dû, selon son secrétaire général, Thorbjorn Jagland, au fait qu’il partage le même drapeau que celui de l’Union européenne : douze étoiles sur un fond bleu.
Un pouvoir de plus en plus manifeste
L’UE a largement éclipsé le Conseil de l’Europe, avec lequel elle est régulièrement confondue, de même quela Cour de Justice de l'UE à Luxembourg est souvent confondue avec la Cour européenne des droits de l’homme, qui se trouve à Strasbourg. La situation géographique du Conseil de l’Europe, à la frontière franco-allemande comme bon nombre d’autres institutions européennes, ne simplifie guère les choses.
Jagland, ancien Premier ministre norvégien et actuel président du comité Nobel décernant chaque année le prix Nobel de la paix, reconnaît que le Conseil souffre d’un problème d’image et entend se concentrer sur ses activités principales, notamment l’inspection des prisons européennes et la surveillance de pays membres soupçonnés de laisser pratiquer la torture. ”C’est incroyable d’avoir des organes de contrôle ayant le droit d’entrer dans n’importe quelle prison en Europe, déclare-t-il. Vous imaginez les Etats-Unis autorisant une organisation internationale à faire de même ? ” A l’heure où la coalition au pouvoir au Royaume-Uni s’efforce de réconcilier ses nouvelles politiques avec ses obligations en matière de droits de l’homme, le pouvoir du Conseil est de plus en plus manifeste. La solution pour faire sortir le Conseil de l’ombre est, elle, moins évidente.