"Attila!"- "Attila fois trois". De gauche à droite Angela Merkel, Christine Lagarde et Wolfgang Schäuble.

Révisez vos leçons d’histoire, M. Schäuble !

Alors que le Parlement chypriote a rejeté la taxe sur les dépôts bancaires négociée par le gouvernement avec l’Eurogroupe, le ministre des Finances allemand a mis en cause la fiscalité avantageuse de Chypre. Mais, après l’invasion turque de 1974, Nicosie n’a pas eu le choix, argumente un éditorialiste.

Publié le 20 mars 2013 à 15:30
"Attila!"- "Attila fois trois". De gauche à droite Angela Merkel, Christine Lagarde et Wolfgang Schäuble.

Pour justifier la décision inédite sur la taxe bancaire, le ministre des Finances allemand, Wolfgang Schäuble, a dit que le modèle économique de Chypre “avait fait faillite”. Selon son opinion fasciste [sic], il considère donc que “celui qui investit son argent dans un pays où l'impôt est faible et peu contrôlé doit en subir les conséquences quand les banques de ce pays cessent d'être viables”.

Nous sommes persuadés que ces initiatives fiscales ont été débattues devant les ministres grecs et chypriotes. Et qu'ont-ils répondu? Ont-ils rappelé que le modèle de Chypre n'a pas été fabriqué par une meute de magouilleurs mais par un Etat européen qui a subi une invasion et une occupation militaires et a dû trouver un moyen de survivre ?

Le tourisme, l’affrêtage naval et les transactions bancaires sont devenues attrayantes grâce à un taux d'imposition faible et à de nombreuses facilités et abattements, parce que cet Etat — dont la moitié est sujette à une occupation militaire sans qu'aucun Schäuble ne le pointe du doigt —  avait attiré des investissements étrangers pour ne pas s'effondrer.

Parce qu'il devait trouver des moyens de se développer alors que la Turquie — qui contrôle 700 000 électeurs d'origine turque en Allemagne — a étranglé l'Etat chypriote en volant 65% de ses hôtels, 87% des projets de complexes touristiques, 40% de ses établissements scolaires, 48% de ses exportations agricoles et 56% de ses plages (nous répéterons sans cesse ces chiffres pour ne pas oublier l'Histoire).

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Comment la république de Chypre aurait alors survécu sans utiliser un modèle économique qui attirerait les investissements requis pour se remettre de l'invasion [de 1974] ? Monsieur Schäuble s'en tient-il à ses cours d'économie sans regarder l'Histoire ? Personne ne lui a dit que sur les 80 sociétes maritimes étrangères enregistrées à Limassol, 36 sont allemandes et seulement 3 sont russes ? Ou peut-être le problème est il là : les Allemands ont 3 sociétés russes dans les pattes alors qu'il va y avoir du travail avec le gaz naturel et que les pétroliers vont aller et venir en Méditerranée ?

Analyse

Un Eurogroupe opaque et peu démocratique

Au lendemain du rejet par le Parlement chypriote de la taxe sur les dépôts bancaires, “personne en Europe ne veut prendre la responsabilité du projet de mise sous séquestre de tous les dépôts bancaires”, écrit Il Sole 24 Ore. Selon le quotidien italien, “la confusion sur cette responsabilité est due au mécanisme de décision déséquilibré qui a marqué les dernières années de la crise européenne”. Le problème, comme d’habitude, c’est que “le niveau auquel est prise la décision”, le Conseil européen et l’Eurogroupe, “n’est jamais celui où a lieu le choix démocratique” — les parlements nationaux. Par ailleurs,

la transparence dans le processus décisionnel européen est très maigre : il n’y a pas de procès-verbal lors des réunions de l’Eurogroupe, dont le dernier patron en date a été choisi aussi en raison de son manque de loquacité ; les chefs de gouvernement se mettent d’accord ensuite bilatéralement au téléphone et, surtout, il n’y a pas de véritable débat public, mais il en existe 17 dans les 17 périmètres nationaux.

Selon le quotidien économique, la confusion interne au sein de l’UE complique également les choses avec l’autre acteur de ce dossier : la Russie, “qui a 20-25 milliards d’euros placés à Chypre”.

Berlin le premier veut imposer à Chypre la fermeture des canaux financiers avec Moscou. Une négociation qui relève des ministres des Affaires étrangères et non de ceux des Finances. Mais l’Europe n’a pas une politique étrangère commune, encore moins au niveau de la zone euro. Le résultat, c’est que [la République de] Chypre finira par demander de l’aide à Moscou. Elle pourrait même dépendre de la Russie au point de quitter la zone euro […] On estime que Chypre a jusqu’au mois de juin pour décider si elle se lie à Moscou ou si elle fait faillite.

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