Toujours là : Margaret Thathcher avec David Cameron (de dos), au 10 Downing Street, en juin 2010.

Thatcher l’a rêvé, Cameron l’a fait

Les coupes massives annoncées par le gouvernement dans les dépenses publiques ont reçu un accueil contrasté dans la presse britannique : dans les journaux de gauche, c'est la consternation pour l'ampleur des mesures d'austérité. A droite, on espère que la réduction de l'Etat conduira rapidement à un retour de la croissance.

Publié le 21 octobre 2010 à 14:53
Toujours là : Margaret Thathcher avec David Cameron (de dos), au 10 Downing Street, en juin 2010.

Dans le Guardian, Seumas Milne compare la “série de coupes” dévoilée par le gouvernement libéral-conservateur à “une sorte de coup d’Etat”, une “barbarie” qui “ne représente pas seulement le programme de réduction des dépenses publiques le plus drastique depuis les années 1920” : elle montre que “la coalition gouvernementale utilise la crise économique pour maîtriser les dépenses de l’Etat mais aussi pour remettre de l’ordre dans la société”.

Ce sera un traitement de choc pour la Grande-Bretagne”, ajoute le journaliste. “C’est le point d’orgue du projet conservateur de démanteler le cœur de l’Etat-Providence — ou, pour reprendre l’expression du ministre des Finances, George Osborne, de ‘réorganiser’ les services publics —, une opération entamée il y a plus de trente ans.”

L’esprit qui prévalait du temps de la Dame de Fer est évoqué dans *The Independen*t par Johann Hari, qui écrit que “Margaret Thatcher est alitée dans un hôpital privé de Belgravia [quartier chic de Londres], mais ses héritiers sont allés beaucoup plus loin dans sa politique qu’elle ne l’aurait jamais rêvé”. Il ajoute : “George Osborne a misé votre avenir sur une théorie économique extrême qui s’est soldée par un échec chaque fois qu’elle a été mise en pratique.

"Sans créations d'emplois, nous sommes coincés"

Puis il se fait accusateur : “David Cameron et George Osborne ont ignoré tout cela. Ils ont ignoré les mises en garde du Financial Times, le journal le plus critique vis-à-vis de leur stratégie. Ils ont rejeté celles de lauréats du prix Nobel de l’économie comme Paul Krugman et Joseph Stiglitz, qui se sont toujours avérées exactes dans cette crise.

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Ils ont refusé de tirer des leçons du fait que le pays qu’ils avaient toujours présenté comme un modèle face à une récession — 'Regardez de l’autre côté de la mer d’Irlande pour apprendre', a déclaré M. Osborne — a connu la pire débâcle du monde développé. Ils ont préféré obéir aveuglément aux principes idéologiques qu’ils avaient appris dans leur prime enfance thatchérienne : sabrer les dépenses publiques et faire payer les pauvres au maximum”.

"La fête est finie"

Dans le camp adverse, Camilla Cavendish écrit, dans le Times, que “la fête est finie. Et quelle fête ! Ivre de largesses, les intellos n’ont pas perçu le mécontentement croissant des contribuables qui ont vu leurs impôts locaux, leurs cotisations sociales et leur redevance télévisuelle augmenter au même rythme que l’incompétence.

Les politiciens ont été jugés sur leurs dépenses ou sur le nombre de lois qu’ils avaient fait adopter, aussi inabordables ou contreproductives fussent-elles. Quel jugement devrions-nous porter sur un gouvernement qui entend dépenser moins ? La plus grosse difficulté pour M. Osborne sera de remettre la Grande-Bretagne sur les rails de la croissance. Sans croissance, de nouvelles réductions des dépenses ou augmentations d’impôt seront inévitables.

Mais, “sans création d’emplois”, poursuit Camilla Cavendish, “nous sommes coincés”. Le secteur privé “devra faire le maximum pour atteindre les objectifs prévus par le ministre des Finances. Nous n’aurons pas seulement besoin de l’énergie verte, qui a un potentiel de création d’emploi limité, mais du secteur dans lequel nous sommes les plus forts : la finance.

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