Le camp de réfugiés de Zaatari, en Jordanie, près de la frontière syrienne.

Ne fermons pas les yeux sur les réfugiés

Peu à peu, l’UE se dote d’une politique d’asile commune et cohérente. Mais l’accès à l’Europe reste extrêmement difficile pour les réfugiés qui voudraient venir. Le drame syrien doit être l’occasion de se montrer plus accueillante, estime le Dagens Nyheter.

Publié le 1 août 2013 à 15:27
Le camp de réfugiés de Zaatari, en Jordanie, près de la frontière syrienne.

Le flot de réfugiés qui déferle sur la Suède est moins important que ce que l’Office des migrations avait envisagé. Près de 45 000 personnes originaires du monde entier auront demandé l’asile en Suède cette année – 9 000 de moins que prévu. Même les hypothèses pour l’année prochaine ont été ramenées à 48 000, soit 3 000 personnes de moins.
Cette diminution du nombre de réfugiés aurait été une bonne nouvelle si elle était le résultat d’un monde plus pacifique, plus démocratique. Or, l’origine de ces nouvelles statistiques semble plutôt être le durcissement des contrôles aux frontières de la part de l’UE. Surtout entre la Grèce et la Turquie.
La situation des réfugiés syriens semble particulièrement désastreuse. António Guterres, le Haut commissaire des Nations Unies pour les réfugiés l’a qualifiée de pire crise humanitaire que le monde ait connue depuis le génocide rwandais. [[A l’heure qu’il est, près de 1,8 million de réfugiés syriens vivent dans les pays voisins de la Syrie]], comme le Liban, la Jordanie, la Turquie et l’Irak. Le camp de réfugiés de Zaatari, en Jordanie, qui a ouvert ses portes au début du mois de juillet de l’année dernière, compterait aujourd’hui plus de 144 000 résidents, ce qui en fait la quatrième ville de Jordanie.

Des intentions mais pas d’action

Les réfugiés sont souvent accueillis avec générosité et compassion. Mais plus le conflit dure, et plus la pression sera forte sur les pays voisins de la Syrie. Dans une interview donné au quotidien britannique The Guardian, António Guterres rappelle que l’afflux massif de réfugiés dans la région ne risque pas seulement de déboucher sur une crise humanitaire, mais également de poser une menace mondiale pour la paix et la sécurité.

Et que fait l’Europe ? Pour l’heure, bien peu de choses. Ce n’est pas faute d’avoir de bonnes intentions. Tous les pays membres de l’UE se sont engagés à observer la Convention de Genève, qui protège les individus fuyant la guerre et les persécutions. En juin, le Parlement européen a adopté un train de mesures qui prévoit un régime d’asile commun et devrait entrer en vigueur dans le courant de l’automne 2015. Espérons qu’il débouchera, à terme, sur une amélioration de l’accueil des réfugiés, notamment sur le plan de la sécurité juridique.
L’Union européenne possède même un cadre réglementaire commun pour la gestion des crises humanitaires de grande ampleur – ainsi, l’UE est tombée d’accord, en 2001, au lendemain de la guerre en ex-Yougoslavie, sur une législation permettant d’octroyer une protection temporaire en cas d’afflux massif de personnes déplacées.
Le problème est que les réfugiés qui souhaitent demander l’asile doivent le faire sur place, à l’intérieur des frontières européennes.

Simplifier l’entrée dans l’UE

Or, les personnes qui sont déterminées à demander l’asile sont bloquées à la frontière. Au début des années 2000, il existait encore quelques biais pour entrer. Plusieurs pays européens permettaient de lancer les procédures d’asile à partir de leurs ambassades respectives. Ces voies étant désormais fermées, les réfugiés en sont réduits à pénétrer clandestinement dans l’Union. Certes, une partie d’entre eux parviennent à franchir la frontière – mais ils sont relativement peu. Jusqu’à présent, l’UE a accueilli près de 43 000 réfugiés originaires de Syrie.
Mardi, dans les pages du [quotidien suédois] Dagens Nyheter, la commissaire européenne [aux affaires intérieures] Cecilia Malmström faisait part de son inquiétude quant au peu d’empressement des Etats membres à accueillir davantage de réfugiés comme leur avait demandé le Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). [[“Il n’y avait pas grand monde pour lever la main” lorsque le HCR a fait appel aux pays membres de l’UE]], voilà quelques semaines, pour accueillir 12 000 réfugiés issus de camps des pays voisins de la Syrie, explique-t-elle.
Il est grand temps que les dirigeants européens revoient leur façon de penser. Si les raisons humanitaires ne suffisent pas, peut-être la perspective d’une exacerbation des tensions au Moyen-Orient peut-elle renforcer leur engagement.
Il convient de simplifier l’entrée légale dans l’UE – par exemple en permettant aux ambassades de délivrer des visas humanitaires, de sorte que les réfugiés puissent exposer les motifs de leur demande d’asile.
L’UE doit gérer collégialement sa responsabilité vis-à-vis des réfugiés syriens. Si ce n’est pas aujourd’hui, à l’heure où près de deux millions de personnes originaires d’un pays proche de l’Europe ont fui leur domicile, alors quand ?

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