Si, selon les termes de l'accord de Schengen, Copenhague ne peut pas rétablir des contrôles frontaliers classiques, elle peut cependant poster aux frontières des officiers des douanes pour effectuer des contrôles aléatoires sur les véhicules. Ceux-ci devraient essentiellement se faire dans les ports, les aéroports, les trains, sur le pont qui relie la Danemark à la Suède sur l’Øresund et à la frontière allemande.
Cette décision a provoqué de nombreuses réactions en Europe, à commencer par la presse danoise.
Ainsi pour le Jyllands-Postencette mesure est "contraire à l'esprit danois" . Le quotidien explique qu’elle est le fruit d'un accord scellé entre le gouvernement libéral-conservateur et le Parti du peuple danois (DF, extrême droite populiste). "Même si le DF essaie de minimiser cette décision, présentée comme une tentative pour empêcher mendiants et criminels d'entrer dans le pays, et pour lutter contre le trafic de drogue, le fait qu’il y aura à nouveau des douaniers et des policiers à nos frontières montre, symboliquement, que nous n’osons plus accepter que nous sommes Européens", s’indigne le journal.
Le Jyllands-Posten note par ailleurs que les contrôles constitueront une entrave pour les nombreux habitants de la région frontalière avec l’Allemagne qui travaillent dans le pays voisin. Le journal estime qu’il vaudrait mieux renforcer la coopération policière à travers les frontières.
Toutefois, écrit par ailleurs l’éditorialiste Ralf Pittelkow dans Jyllands-Posten, "les contrôles devraient être limités" et ils auront pour but d’assurer "un meilleur contrôle des armes, de la drogue, de la contrebande, du trafic d’êtres humains, de l’immigration illégale et des criminels qui veulent entrer au Danemark" : un objectif qualifié de "raisonnable" et impossible à atteindre sans contrôles aux frontières.
Voilà pourquoi Pitteklow qualifie les critiques vis-à-vis du gouvernement d’"hystériques", à commencer par celles qui dénoncent les effets "dévastateurs" du rétablissement des contrôles, ou qui imaginent "de longues files de camions et de touristes désespérés" à la frontière. De même, "la libre circulation au sein de l’UE ne serait pas menacée, car le commerce, les travailleurs, les capitaux et les voyageurs seront peu affectés".
D’un tout autre avis, Giovanna Zincone, dans le quotidien italien La Stampa, fait le parallèle entre l’attitude des Européens et celle des Etats-Unis, où le président Barack Obama a rappelé récemment dans un discours à El Paso, à la frontière mexicaine, que son pays "doit sa position dans le monde à sa capacité à alimenter la vie économiques avec de nouveaux talents et énergies, donc à l’immigration aussi", et a relancé le Dream Act, une loi visant à régulariser près d’11 millions d’immigrés en situation irrégulière. "Aujourd’hui, l’Europe a peur des immigrés", écrit Giovanna Zincone : "elle est réticente même face aux nouveaux flux réguliers. Au contraire, Obama a fait preuve d’ouverture, de gratitude et de confiance. Il n’a pas oublié l’aspect de la légalité, mais il ne l’a pas dramatisé […] Il a parlé ainsi parce que l’Amérique sait qu’elle est un pays d’immigration et elle en est fière, alors que l’Europe, malgré quelques annonces creuses en ce sens, ne veut pas l’accepter. Et elle se trompe, car, ces dernières dix ans, elle a devancé les Etats-Unis comme terre d’immigration".