Euroscepticisme

Slavoj Žižek : ne jouons pas aux faux naïfs

Publié le 4 juillet 2014 à 06:43

Le triomphe des eurosceptiques et des xénophobes aux élections européennes, alors que les institutions européennes sont très critiquées, portent Slavoj Žižek à se poser la question de “pourquoi la droite xénophobe a-t-elle mis autant de temps pour faire une percée décisive ?”.

Après tout, écrit le philosophe slovène dans The New Statesman, une politique comme Marine Le Pen, du Front national (FN), “est clairement à l’opposé des stériles technocrates européens : en portant les inquiétudes des gens ordinaires, elle ramène de la passion dans la politique

Mais si le succès électoral du FN et des autres partis eurosceptiques le 25 mai n’est pas surprenant, le philosophe note également une “fausse naïveté dans les réactions de la gauche. Pour Žižek, les technocrates aux manettes à Bruxelles et les eurosceptiques représentent les deux côtés d’une même pièce :

Le mode par défaut de la politique contemporaine est celui de la gestion experte et dépolitisée et de la coordination des intérêts. [[Le seul moyen d’introduire de la passion dans ce terrain, de mobiliser activement les gens, c’est la peur : peur des immigrés, peur de la criminalité, peur d’une dépravation sexuelle impie, peur d’un Etat excessif, avec son corollaire fiscal, peur d’une catastrophe écologique, peur du harcèlement,…]]

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Les eurosceptiques comme Le Pen attirent les électeurs en rejetant ce que Žižek appelle l’“élite dirigeante” européenne, qui “sait de moins en moins comment diriger” :

Regardez comment l’Europe gère la crise grecque. En mettant la pression sur la Grèce afin qu’elle rembourse sa ette, et en mème temps en ruinant son économie à travers des mesures d’austérité, et ainsi faisant en sorte que la dette grecque ne pourra jamais être remboursée. [...] Les exigeances et les ordres de l’UE [...] ne donnent aucune chance aux Grecs, parce que leur échec fait partie du jeu.

Pour Žižek, la montée du populisme xénophobe qui a marqué les élections européennes représente “l’échec de l’alternative de gauche au capitalisme global”, mais aussi “la preuve qu’il y a eu un potentiel révolutionnaire, une grogne que la gauche n’a pas été capable de mobiliser”.

Dans The Guardian, je chroniqueur Antony Loewenstein développe l’argumentation de Žižek. Dans un récent débat, dit-il,

Le public affirmait que le passé sombre et raciste de la Grèce, de même que son présent pas très différent, doivent être rejetés. Mais trouver une réponse efficace à l’utilisation et l’abus du nationalisme, chéri par l’extrême droite et le gouvernement actuel, n’est pas une tâche facile. Heureusement, il y a des signes qui indiquent que de nombreux Grecs s’en prennent à ceux qui sont directement responsables de la crise actuelle et ne croient pas à ceux qui, comme la patronne du Fonds monétaire international Christine Lagarde, sont toujours dans le déni lorsqu’il s’agit de la manière dont leur organisation pénalise les plus vulnérables en Grèce.

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