Dans un article paru dans la revue Foreign Affairs, le politologue Lorinc Redei, critique la nomination des deux nouveaux dirigeants de l’UE, le président du Conseil européen, Donald Tusk, et la Haute représentante pour la politique étrangère, Federica Mogherini, estimant qu’il s’agit d’un “désastre” et que les Vingt-huit “ont collectivement privé l’Union européenne de tout poids dans les affaires mondiales”.
Redei note que “Tusk est peut-être un politicien de talent”, mais “il est très peu probable qu’il devienne l’architecte d’un consensus au niveau du continent” :
Tusk n’est pas connu pour être un bon bâtisseur de coalitions. Ses deux gouvernements en Pologne s’appuyaient sur un seul partenaire à la Chambre basse (et aucun au Sénat). Son prédécesseur, Herman Van Rompuy, avait “des décennies d’expérience” en tant qu’architecte de coalitions dans la politique fédérale de la Belgique.
Ajoutant que Tusk “ne parle pas français et ne maîtrise pas l’anglais” Redei ajoute qu’
il est difficile de croire qu’il pourra imaginer des compromis créatifs parmi ses anciens collègues, si l’on considère les difficultés qu’il a rien qu’à communiquer avec eux dans une langue commune. Le message de sa nomination est clair : les leaders nationaux européens préfèrent qu’une perspective européenne ne vienne pas perturber leur approche basée sur le plus petit commun dénominateur.
Pendant ce temps, la ministre italienne des Affaires étrangères, Federica Mogherini
manque de deux des caractéristiques essentielles pour devenir le porte-parole efficace de la politique étrangère de l’UE : une stature de leader et une stature internationale. […] Mogherini n’a aucune expérience des institutions complexes de l’Union. Elle n’a pas d’expérience directe de la bureaucratie du Service européen d’action extérieure et des ses pièges. […] Elle n’occupe des postes électifs que depuis six ans et elle n’est pas connue en dehors de l’Europe. Les gouvernements étrangers pourront difficilement la prendre au sérieux.
De plus, estime encore Redei, la gestion de la part du Conseil européen de la crise en Ukraine a été “aussi peu satisfaisante qu’insuffisante pour dissuader le président russe Vladimir Poutine de nouvelles agressions”.
Pour l’auteur, le dernier sommet européen prouverait que les dirigeants de l’UE
sont préoccupés de ne pas confier les postes-clé de l’Union à des personnalités de haut profil qui pourraient mettre à mal leurs intérêts nationaux au nom d’un intérêt commun supérieur européen. […] En nommant des personnalités de bas profil à des postes importants, les dirigeants européens sapent leur propre capacité à appréhender les grands défis de notre temps, comme la résurgence de l’expansionnisme russe.
Le sommet de fin août a ainsi donne le “feu vert” à la Russie pour poursuivre l’escalade dans ses attaques en Ukraine, estime enfin Redei, montrant aux Etats-Unis que l’UE n’est pas capable d’être à la hauteur de ses responsabilités :
Seuls, les membres de l’UE manquent de puissance. Ensemble, ils manquent d’ambition. Et dans les deux cas, Poutine est sur le point de les mener en bateau.